Qui sommes nous ?

Tove Jansson

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par Monique Hennequin

     Après Gabrielle Vincent (1) et Eléonore Schmid, la littérature de jeunesse a perdu un de ses grands auteurs, Tove Jansson, créateur des Moumines.

     En France, son oeuvre a été traduite par Kersti et Pierre Chaplet et publié dès 1969 par les éditions Nathan dans la très belle collection dirigée par Isabelle Jan, la Bibliothèque Internationale. Les enfants français ont pu ainsi découvrir, à travers le personnage de Moumine, l’univers des trolls.

     Tove Jansson, parmi d’autres prix, avait obtenu en 1966, pour l’ensemble de son œuvre, le Prix Hans Christian Andersen.

     Plusieurs titres ont été réédités récemment par les éditions Pocket : Moumine le troll, L’été dramatique de Moumine, Un hiver dans la vallée de Moumine.

 ( texte paru dans le n° 71 – novembre 2001 – du bulletin du CRILJ )

  (1) à qui personne ne rendit hommage dans la revue du CRILJ.

   moumine

Née à Helsinki le 9 août 1914 et décédée le 27 juin 2001, Tove Jansson est femme de lettres, illustratrice et peintre finlandaise. Fille du sculpteur Viktor Jansson, suédophone de Finlande, et de l’illustratrice suédoise Signe Hammersten, elle étudia à la faculté d’art de Stockholm et devint peintre. Lors de la Seconde Guerre mondiale, pensant aux enfants qui rêvaient de s’évader, elle inventa le pays des Moumines. Elle n’écrivait pas en finnois mais en suédois de Finlande. Elle travailla pour la presse avec l’aide de son frère Lars Jansson, dessinateur de bandes dessinées. Elle vécut pendant la majeure partie de sa vie avec l’artiste plasticienne Tuulikki Pietilä. « C’est sans conteste par la traduction des onze volumes de la saga de la famille Moumine que les enfants des pays latins peuvent comprendre un peu mieux la place des trolls dans l’imaginaire collectif des peuples scandinaves, c’est-à-dire la place de tout ce qui est vivant dans une nature impressionnante où l’homme et l’enfance savent qu’ils ne sont pas véritablement les maîtres. » L’œuvre de Tove Jansson culmine certainement avec Papa Moumine et la mer, méditation mélancolique sur la solitude, où ses personnages de prédilection atteignent une gravité inhabituelle.

Pour en finir avec une idée fausse

  

     Une idée fausse qui peut vous coûter cher et on me pardonnera, j’espère, d’aborder un sujet aussi prosaïque.

     Nombre d’associations – et les divers CRILJ ne font pas exception – croient que les associations sous le régime de la loi de 1901 n’ont pas le droit de faire des bénéfices. Cette croyance limite considérablement leur action puisque les animations, formations et prestations de tous ordres sont réalisées au tarif les plus bas, quant elles ne sont pas carrément gratuites.

    Sachez que la loi n’interdit pas les bénéfices. Elle interdit le partage ou leur attribution aux membres de l’association. Les bénéfices engendrés par le produit d’une prestation de service, d’une vente, d’une location, d’abonnements, etc, doivent permettre le développement de l’association, son autofinancement.

    Naturellement, il ne s’agit pas de se lancer dans un commerce effréné qui n’aurait plus rien à voir avec l’objet de l’associaiton, auquel cas celle-ci devrait alors adopter un autre statut. La loi distingue d’ailleurs ce qui relève de l’activité normale de l’association ou d’opérations plus exceptionnelles. Je ne pense pas que les CRILJ soit dans ce cas de figure.

    Alors, je vous en conjure, faites payer vos interventions au juste prix sans oublier, bien sûr, que nous oeuvrons avec le souci du service public et dans un esprit d’éducation populaire. Mais, rien n’est gratuit, le travail et la compétence se paient.

    Une dernière précision : une association peut rembourser à ses membres des frais, de déplacement par exemple, engendrés par une intervention, sur présentation d’un justificatif de dépense.

    Alors, une fois pour toutes, faites savoir autour de vous ce que signifie réellement « à but non lucrarif » et … développez vous !

 ( article paru dans le n° 89 – mars 2007 – du bulletin du CRILJ )

denise

 

 

 

Inspectrice principale du Ministère de la Jeunesse et des Sports, Denise Barriolade a essentiellement œuvré dans le secteur ‘jeunesse et éducation populaire’. Après sept ans dans le Val-de-Marne, elle est conseillère technique au cabinet d’Edwige Avice puis d’Alain Calmat où elle gère notamment les projets de l’Année internationale de la jeunesse. Après un passage éclair à l’Institut National d’Education Populaire durant lequel elle met en place le Rayon vert, observatoire du livre scientifique et technique pour la jeunesse, elle passe quatre ans à Eurocréation où elle crée le réseau des Pépinières européennes pour jeunes artistes. Elle anime, entre 1986 et le début des années 90, le groupement d’intérêt scientifique PROMOLEJ (Promotion de la Littérature des Jeunes). Exerçant dix ans à la direction de la jeunesse, Denise Barriolade apporte un soutien important aux pratiques culturelles et artistiques (festivals de cinéma, théâtre et musique, stages de réalisation, etc). Elle gère le Prix de la jeunesse au festival de Cannes et les Prix littéraires du Ministère de la Jeunesse et des Sports dont le CRILJ fut prestataire de service. Après près de cinq ans à l’Organisation Internationale de la Francophonie où elle se consacre principalement aux politiques de jeunesse dans les pays d’Europe centrale et orientale, elle rejoint le ministère avant de prendre sa retraite et de se consacrer, entre autres choses, au CRILJ dont elle est l’actuelle présidente.

Rideau !

 

 

 

 

 

Rideau !

 par Véronique Soulé

     Après 22 ans au service de la lecture publique en Seine-Saint-Denis et du développement de la littérature jeunesse, Livres au trésor cesse ses activités à la fin de ce mois.

      En effet, le Conseil général du 93, principal financeur (à 70%) du fonctionnement n’est pas revenu sur sa décision de supprimer sa subvention versée à la ville de Bobigny. Celle-ci s’est donc vue contrainte de fermer Livres au trésor.

     Livres au trésor, c’était :

 – un centre de ressources, riche de 80000 ouvrages et revues pour enfants et/ou spécialisés, ouvert à tous, avec un accompagnement personnalisé.

 – un lieu de rencontres, de formation, d’échanges, pour tous les professionnels du livre ou de l’enfance sur le département, avec en particulier de nombreux comités de lecture et journées d’étude.

 – la publication d’outils professionnels (sélection annuelle de nouveautés, sélection de CD, etc), diffusés gratuitement dans les collèges, écoles, lieux petite enfance du département et au-delà.

 – un site internet riche de nombreuses références et informations

    Un certain nombre de nos publication sont encore disponibles. Si vous souhaitez les recevoir, merci de nous envoyer un courrier avant le 31 janvier 2011 :

 – Sélections annuelles (2009, 2008, 2007, 2006, 2005, 2004, 2003)

Chansons au trésor (2009)

– Plaquette Des prinçusses et des grands frères. Ingéniosité et inventivité de la littérature norvégienne pour la jeunesse (2008)

– Sélections de sites internet pour la jeunesse Des Clics 1(2008) et Des clics 2 (2009)

    Vous trouverez la description de ces publications sur le site qui va également fermer.   

    L’équipe de Livres au trésor remercie celles et ceux qui lui ont accordé leur confiance au fil de ces années. 

    livres au trésor

Bibliothécaire, responsable de Livres au Trésor, Véronique Soulé est également réalisatrice et animatrice, sur la radio associative non-commerciale Radio Aligre FM, de Ecoute ! Il y a un éléphant dans le jardin, magazine hebdomadaire consacré à l’actualité culturelle des enfants. Chaque mercredi, de 10 à 12 heures. Pour contacter Véronique Soulé, c’est ici.

 

 

 

 

Jean-Claude Marol

      On ne rencontrera plus dans les allées des salons le sourire et la gentillesse de Jean-Claude Marol, illustrateur, humoriste, écrivain, poète, conteur, concepteur, homme de théâtre, qui avait su garder un regard d’enfance.

     D’abord architecte, il s’est transformé en bulle et s’est posé dans de nombreux magazines (Pilote, L’Echo des Savanes, Paris Match, L’Evènement du Jeudi, Panorama, les magazines de Bayard-Presse) et ses premiers livres d’humour se sont retrouvés chez Gallimard comme Vagabul et ses personnages sur FR3.

     Pour son album Exils paru aux éditions Axel Noël, Régine Pernoud disait : « J’ai vivement apprécié votre conte plein de fraicheur et d’humour dénotant une connaissance approfondie de cet héritage médiéval que visiblement vous aimez autant que moi. »

     A propos de Vagabond (Gallimard, 1982) :

 – « Il est inimitable, Marol, dans ce mélange de naïveté tendre et d’impayable dureté. » (Bayard Presse)

– « Marol, avec ses petits personnages fantomatiques, bougons et obstinés et ses décors vides, nous emmène dans l’imaginaire le plus poétique. » (Les Nouvelles Littéraires)

     A propos de Pli urgent (L’originel, 1985) :

 – « Marol ramène les mots d’amour à leurs résonances premières, enfantines. A leur évidence poétique. » (Le Monde)

– « Quoi de plus urgent qu’une lettre d’amour ? Marol s’adresse à tous ceux qui aiment, à tous ceux qui s’aiment, et qui l’aimeront sîrement. » (Télérama)

     A propos de Feudou dragon secret (Ipomée, 1983) :

 – « Un conte moderne écrit de façon limpide et avec un certain humour. » (Odile Berthémy, Les Nouvelles Littéraires)

 ( article paru dans le n°71 – novembre 2001 – du bulletin du CRILJ )

« Dimanche 14 octobre 2001, sur un quai de Seine, nous sommes une trentaine à rendre un dernier hommage à notre ami Jean-Claude Marol, récemment disparu. Le vent, la bruine, les feuilles dorées de l’automne, le chant sans âge de deux musiciens, les cloches de Notre-Dame qui font vibrer les voûtes du ciel, les fleurs jetées à l’eau longeant lentement chacun d’entre nous avant de disparaître dans le vif du courant… Difficile en cet instant de délimiter clairement la frontière entre ombre et lumière, tristesse et joie. Nous sommes sur le fil. À égale distance de la déchirure et du bonheur. » (Thierry Cazals)

   jean-claude marol

 « Un jour, j’étais attendu dans une classe. Malheureusement, mon intervention (demandée par la direction) avait dû irriter l’instituteur : quand je suis arrivé, une interrogation écrite avait été prévue. On me faisait comprendre que j’étais de trop. J’aurais pu repartir. Quasiment sans réfléchir, j’ai dit aux enfants : “Écoutez, j’ai une idée. On va bien faire une interro écrite, mais vous allez vous poser des questions sur vous-mêmes, aussi impertinentes qu’elles soient.” C’est allé très vite. En dix secondes tout a échappé à l’instit’. Les gosses m’ont regardé avec cette sorte de vitalité, prête à tous les coups, qu’ont les onze, douze ans. Le résultat fut époustouflant. Contrairement à d’autres fois, ils n’ont pas posé de questions sur le sexe, mais des questions sur Dieu ou sur la mort. En un instant, on a assisté à un fantastique retournement, passant d’une interrogation qui crée le barrage à une totale ouverture. Alors, j’ai accéléré le mouvement. J’ai dit : “Dans dix minutes, je ramasse les copies ! Vite, vite !” Recréer l’urgence. Dans cette urgence, on n’a pas le temps de tricher, de faire semblant. Il faut aller vite. Ils ont en face d’eux un adulte pressé, qui fait face, qui est dangereux, tendrement dangereux. Il faut y aller. C’est une colère. »

En revenant de la foire

     Pour cette Foire 2008, quelques 6000 professionnels de l’édition, livres et multimédia pour l’enfance et la jeunesse dont 4701 professionnels non italiens en provenance de 43 pays se sont retouvés à Bologne « sous le signe du business et du commence pour faire un tour d’horizon sur les nouvelles tendances du produit et échanger des droits d’auteurs. »

     Le Centre des agents littéraires est devenu le lieu privilégié des rencontres. Le Centre des traducteurs, acteurs essentiels pour la circulation du produit, revèle la création d’une base de données réunissant les traducteurs du monde entier, la Word Directory of Children’s Books Translators.

     Et les créateurs de livres – les poètes, les écrivains, les illustrateurs, les éditeurs concepteurs – dans tout cet ensemble d’affairisme ?

    L’on pouvait en croiser encore quelques uns pour un dialogue au Café des Illustrateurs (créé, rappelons-le, par l’éditeur français Pierre Marchand), dans l’exposition des illustrateurs dont les vedettes étaient, en cette année 2008, les artistes de l’Argentine, pays d’hôte de la Fiera. Mais les français étaient rares.

    A l’extérieur de la Foire, nombreuses cependant était encore, dans la ville, les conférences, débats et expositions organisés par les institutions culturelles.

     Décernant ses prix, le jury des Bologna Ragazzi Award, toujours sous la présidence du Professeur Faeti, de l’université de Bologne, en attirant cette fois l’attention sur l’éclectisme de la recherche conceptuelle dans les ouvrages présentés cette année, prouve, quand même, l’importance des liens à maintenir entre les créateurs et les professionnels dans la mise en valeur de la littérature pour l’enfance et la jeunesse.

     Il vaudrait mieux que le professionnels en tiennent compte.

 ( article paru dans le n°92 – mars 2008 – du bulletin du CRILJ )

 

Critique spécialisée en littérature pour l’enfance et la jeunesse, d’abord à Loisirs Jeunes, puis à l’agence de presse Aigles et dans de très nombreux journaux francophones, Janine Despinette, qui fut également chercheuse, apporta contributions et expertises dans de multiples instances universitaires et associatives. Membre de nombreux jurys littéraires et graphiques internationaux, elle crée, en 1970, le Prix Graphique Loisirs Jeunes et, en 1989, les Prix Octogones. A l’origine du CIELJ (Centre Internationale d’étude en littérature de jeunesse) en 1988, elle fut jusqu’à récemment une fidèle  administratrice du CRILJ.  

Accompagner les jeunes lecteurs

 

 

 

 

 

Accompagner les jeunes lecteurs

par Mouloud Akkouche

      Le conseil général de Seine-Saint-Denis avait, début 2010, envisagé de réduire fortement la subvention qu’il alloue au Salon du livre et de la presse jeunesse. Ce rendez-vous annuel s’en était trouvé fortement menacé. Pas sa tenue même – les éditeurs le maintiendraient – mais toutes les actions menées en amont, en faveur de la lecture, tout le travail avec les centres de loisirs, les groupes scolaires, les associations caritatives du 93 et d’ailleurs. Face au tollé provoqué par cette inadmissible perspective, les aides du département ont pu être rétablies pour le salon 2010.

     Dans leurs discours, tous les politiques encouragent le combat contre l’illettrisme. Dans les faits, les élus de droite comme de gauche semblent vouloir lui couper les ailes : politiquement, le sujet est moins rentable que l’insécurité.

     Depuis la naissance de la manifestation, des centaines de milliers de jeunes (lecteurs, moins lecteurs, pas du tout lecteurs) ont pu bénéficier des actions du Centre de promotion du livre de jeunesse (CPLJ).

 Sensibiliser les jeunes lecteurs avant de les amener au salon

     Il s’agit d’aller à la rencontre d’élèves sur leurs lieux scolaire, afin de les sensibiliser et leur offrir le goût de la lecture ; puis de les amener sur le salon pour qu’ils aient un échange avec les auteurs et qu’ils profitent des animations et expositions. Pas une mince affaire. Souvent ce sont des gosses sans livres à la maison.

     Les enfants du président du conseil général de Seine-Saint-Denis et des autres personnes décisionnaires en matière de subventions ont, comme les miens, à domicile, tout ce qu’il faut en matière culturelle. Tant mieux pour eux. Mais beaucoup d’autres gosses sont nés sans bibliothèque.

     Certes, il y a les bibliothèques municipales, médiathèques, CDI de collèges et lycées. Il ne faut pas négliger leur réussite au quotidien : petites gouttes d’encre anonymes qui ne font jamais les unes des journaux. Mais, dans une société où le fric et l’image sont rois, ces structures, même les plus inventives et dynamiques, ont des difficultés à faire aimer le livre aux plus jeunes – surtout les plus démunis.

     Elle ne peuvent pas tout faire pour le livre. Enfants, auteurs, bibliothécaires, enseignants parents, sont donc très heureux que le centre leur apporte son professionnalisme et les accompagne. Le Salon du livre jeunesse dure quelques jours, les actions en faveur de la lecture du CPLJ tout le long de l’année scolaire.

 Des ateliers initiés par Rolande Causse, discrète militante du livre

     Ce rendez-vous international est né des ateliers d’écriture des centres de loisirs jeunesse de la ville de Montreuil. Des ateliers initiés par Rolande Causse. Une militante du livre – très discrète – dont le travail remarquable pour faire découvrir la littérature jeunesse est souvent oublié.

     Assise au début des années 80 sur la moquette d’un centre de loisirs, cette femme élégante lisait aux gosses des albums de qualité achetés par le service jeunesse de la ville de Montreuil. Elle fut l’une des créatrices d’une manifestation qui a aujourd’hui plus d’un quart de siècle.

     Offrir un large accès à la lecture reste une priorité. Surtout en ces périodes où les communautaristes et nostalgiques d’un ordre nouveau ne veulent imposer que leurs livres. Les autodafés virtuels sont très dangereux : il ne laissent pas de traces, pas de cendres. Mais un livre de plus ou de moins peut changer un citoyen.

     Plus les citoyens – surtout les plus jeunes – ont accès à un grand nombre de livres, moins les intégristes et les xénophobes les manipuleront. Ni les dealers de rêves carrossés par BMW ou griffés par Lacoste. Pas par hasard que les dictatures commencent toujours par brûler des livres.

      foule

Né à Montreuil (Seine-Saint-Denis) en août 1962, Mouloud Akkouche y passe une partie de sa vie et, adolescent, hante la bibliothèque. BEPC en poche, il sera, de 1981 à 1989, serveur, plongeur, animateur d’ateliers lecture-écriture, directeur adjoint de colonie de vacances, archiviste, pion, vendeur de voitures par téléphone. Il publie une première nouvelle en 1992 dans une revue québécoise et, peu après, Causse toujours ! dans la collection « Le Poulpe » de Jean-Bernard Pouy aux éditions Baleine. Deux romans en « Série Noire » avec, pour personnage central, l’inspecteur Nassima Benarous, jeune femme kabyle. Scénariste, dramaturge, auteur de pièces radiophoniques, écrivain du récit court, ne dédaignant pas le récit familial, Mouloud Akkouche écrit également pour la jeunesse (Une marque d’enfer, en 1999, dans la collection « Le Furet enquête » chez Albin Michel). Il vit désormais en région toulousaine. Merci à lui pour nous avoir confié ce texte.

 

 

Eléonore Schmid

Eléonore Schmid est née à Lucerne, en Suisse, en 1939. Elle a fait ses études à l’Ecole d’Art de Lucerne, travaillé à Zurich comme graphiste et illustré des magazines pour la jeunesse, des jeux et des cartes. Elle a réalisé la maquette de nombreux livres. Après avoir voyagé en Italie, Angleterre et Irlande, puis à Paris, c’est à New-York qu’elle a, avec Etienne Delessert, illustré son premier livre pour enfants (The Tree publié en France en 1969 sous le titre L’arbre par François Ruy-Vidal).

     Elle continue a travailler en étroite collaboration avec Etienne Delessert puis publie de nombreux albums aux éditions Nord-Sud.

    En 1968, elle reçoit le Plaquette d’Or de la Biennale Internationale de Bratislava pour Le mouton noir (chez Nord-Sud) et le Prix Graphique de la Foire de Bologne lors de la réédition en 1977.

     On retrouvera avec plaisir ses très belles illustrations, crayons de couleurs, aquarelle et gouache se mêlant pour arriver à des dégradés subtils et des coloris d’une douceur et d’une richesse infinie, comme dans A ta santé le loup sur un texte de Chantal de Marolles (1979), L’âne Augustin sur un texte de Régine Schindler (1990), Toufie et le lune (1996) ou Le Noël du petit lapin (2000), tous publiés aux éditions Nord-Sud.

     Elle a, en 1978, illustré Les contes du chat perché de Marcel Aymé pour les éditions Gallimard et, en 1984, Les trois plumes de Jacob et Wilhelm Grimm dans la prestigieuse collection « Monsieur Chat » de chez Grasset Jeunesse,

( article paru dans le n° 70 – juin 2001 – du bulletin du CRILJ )

 eleonore schmid

La Foire de Bologne vue de Suisse

 

 

 

 

 

     Evénement mondial annuel numéro un dans le domaine de la littérature pour la jeunesse, la Foire du Livre pour Enfants vient d’ouvrir ses portes, pour sa vingt-deuxième édition, dans les modernes installations d’exposition de Bologne. Durant quatre jours, ce rendez-vous rassemble les éditeurs et spécialistes de littérature enfantine avant tout, mais également de livres scolaires, de bandes dessinées et, cette année, d’informatique éducative.

     S’il existe aujours’hui de par le monde plus d’une dizaine de très importantes foires internationales du livre, le Salon du Livre de Paris (en mars-avril) et, surtout, le Foire de Francfort (en octobre) étant les plus essentielles en Europe, la Foire de Bologne est la seule, à l’échelle planétaire, à se consacrer exclusivement à l’édition pour enfants et adolescents. Cette importance s’observe immédiatement dans les chiffres : 1007 éditeurs-exposants, issus de 53 pays ; 13000 mètres carrés de surface d’exposition ; 14826 visiteurs en 1984. En fait, Bologne est le seul endroit où le chaland peut découvrir simultanément les derniers livres anglais, japonais, hongrois, de Lausanne ou de Singapour, et cotôyer le « gratin et la plèbe » de la profession.

 Les fonctions d’une foire

     Caractéristique immédiatement sensible pour le visiteur, cette foire est une affaire de professionnels pour d’autres professionnels, ceci à deux niveaux. C’est d’abord le va-et-vient incessant des responsables littéraires et directeurs commerciaux d’un stand à l’autre. C’est à Bologne au printemps et à Francfort à l’automne que « se fait » commercialement parlant l’édition jeunesse. L’un des phénomènes actuels de celle-ci est en effet une internationalisation forcenée, qui permet d’abaisser sensiblement les coûts de production et qui voit classiques, auteurs reconnus et démarches originales se publier successivement dans de multiples langues ou se coéditer simultanément par-delà les océans. Chaque année voit ainsi des courants et des modes nouveaux se dessiner.

     Deuxième aspect : une telle manifestation constitue un mouvement de valse continu pour cartables. La foule quasi anonymes des illustrateurs qui ne veulent plus l’être court inlassablement stands et officines de spécialistes pour décrocher le contrat nourricier. Rude tâche, le plus souvent ingate et vaine, à laquelle ne sacrifient plus les « vedettes de l’artistic society » également présente en nombre. Poignées de mains, signatures, adresses et tuyaux s’échangent à la vitesse grand V et la caravane des non-initiés passe…

 Des expositions

     1985, promu Année de la Jeunesse a occasionné la modification de l’exposition d’illustrateurs. Un concours a été organisé par la Foire, l’ONU et l’UNICEF. 651 illustrateurs de 28 pays y ont participé en proposant un projet d’affiche de l’année. 55 ont été sélectionnés pour l’exposition et le vainqueur, l’allemand Fred Münzmaler, verra bientôt son affiche répandue sur les cinq continents comme symbole officielle de ce thème.

     Une autre exposition traditionnelle, beaucoup moins développée mais largement fréquentée, est consacré à un aspect structurel de la bande dessinée.

     Enfin, dans un secteur réservé chaque année à une région particulière du globe, c’est la collection Kerlan de l’Université du Minnesota, le plus riche agglomérat des USA en matériel figuratif, manuscrits, art populaire, constituant la part créative pour la jeunesse d’un groupe ethnique particulier, qui prendra la place admirablement occupée en 1984 par une expositon d’illustrateurs latino-américains.

 L’assaut de l’informatique

     S’ouvrant à une réflexion sur un thème parallèle à l’édition, la Foire de Bologne répond, pour la troisième année consécutive, au succès envahissant de l’informatique. Après le titre provocateur Les jeunes et l’ordinateur, un défi pour les éditeurs, un pas semble cette fois franchi vers de nouvelles possibilités d’échanges culturels et économiques avec un programme en trois volets.

     Multinationales et formes performantes du hardware et sofware seront largement représentée dans l’exposition Education et Informatique. Industriels, scientifiques et délégués du monde entier prendront part à un important séminaire centré sur La société de la connaissance et les nouvelles technologies de l’information alors qu’une conférence réunira les plus éminents chercheurs occidentaux afin d’argumenter sur les différents systèmes, projets, instruments et technologies pour l’éducation du futur. Cette ampleur prouve bien la ferme intention du monde éditorial de ne pas manquer le départ de la course technologique. Certaines grandes maisons françaises, italiennes et américaines sont d’ailleurs déjà concrètement présentes dans ce marché, conscientes qu’il s’y joue une partie vitale.

 ( texte paru dans le n° 25 – mai 1985 – du bulletin du CRILJ )

  bologne

Né en 1958, Olivier Maradan a travaillé dans le domaine de la promotion de la lecture et de la littérature de jeunesse durant les années quatre-vingt et jusqu’au milieu de la décennie suivante. Il a été en Suisse l’un des fondateurs d’AROLE, l’association romande de littérature pour l’enfance et la jeunesse, construite sur le modèle du CRILJ, et durant une décennie l’un des organisateurs des fameuses Journées d’AROLE, séminaire bisannuel de formation et d’échanges. Ses travaux ont surtout porté sur la transmission du goût de lire, dans le cadre de la formation des enseignants, des bibliothécaires et des parents. Il a tenu durant douze ans une chronique hebdomadaire de présentation de nouveautés éditoriales et de manifestations internationales en littérature de jeunesse pour un quotidien de Fribourg et a siégé dans plusieurs jurys en Suisse, en France et en Italie. Depuis 1996, ses responsabilités professionnelles dans l’éducation l’ont éloigné du domaine éditorial. Il est actuellement secrétaire général adjoint de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique et responsable de l’harmonisation de la scolarité obligatoire en Suisse.

 

 

 

Au revoir Vitaly …

 

     Petit-Âne ne redescendra pas du ciel. Ce n’est pas faute pour Vitaly Statzynsky et son ami l’ourson de l’avoir attendu… Combien de fois ne l’ont-ils pas vu naviguer dans son bateau-lune au beau milieu de la nuit ? Alors de guerre lasse, c’est Vitaly qui s’en est allé, danser avec lui et Kolobok au milieu des étoiles.

     Il n’a pas attendu la nuit. Il vient de partir par ce beau matin d’automne. L’occasion était trop belle, c’est celui de tous les saints.

     Espérons qu’il n’a pas emporté avec lui cette petite écharde qui s’était plantée dans son cœur, il y a quelques années de cela, lorsque Petit-Âne s’envola entre ciel et terre pour ne pas revenir alors qu’il l’attendait fermement avec ses crayons et ses couleurs.

     Allons ! Aurais-je oublié que Vitaly, pressentant sans doute qu’on ne lui  donnerait pas le temps d‘en conter la suite, avait, pour finir, coupé d’un coup de son pinceau magique, la corde qui fit tant couler d’encre ?

     Mais qui s’en aperçut ?

     Sans aucun doute ces tout-petits qu’il captivait par ses dessins et son rire un peu cassé tout en s’obstinant à conter, dans sa langue natale, les mésaventures de Kolobok, du Renard, du Lièvre et du Coq, comptant sur Tatiana pour traduire, si d’aventure les images ne se suffisaient pas.

     Dessinateur et coloriste talentueux certes, mais cabotin en diable et  têtu ! Quand il avait dit : « C’est Russe ! » Il n’y avait plus rien à ajouter car, à ce moment-là tout au fond de son regard, à la fois malicieux et perçant, on voyait briller des étoiles.

     Son père, ministre de la santé, fut fusillé sous Staline, sa mère, professeur de médecine spécialiste en ophtalmologie, fut condamnée à exercer son art dans des conditions misérables où elle ne disposa plus des moyens qu’elle méritait. Adolescent, il connut la prison « pour avoir volé une pomme » avant de devenir le célèbre dessinateur reconnu à Moscou et par la presse étrangère. Il créa Kolobok, un journal destiné aux enfants tiré à plus d’un million d’exemplaires. Mais son art, considéré comme « anti-soviétique », ne plaît pas au régime. Privé de nationalité soviétique, exclu de l’Union des peintres de l’URSS, il quitte le pays en 1978. Après maintes tribulations, il parvient à Lyon  où il retrouva et sa sœur et quelques amis. Arrivé là, il n’hésita à se faire engager dans une entreprise sans connaître un seul mot de Français. Inutile de préciser que l’expérience ne dura pas longtemps.

      À Paris, il fut accueilli à la cité des Arts où il séjourna pendant deux ans avant de s’installer au 17 rue des Orteaux. Là se retrouvaient pour boire chanter, rêver et pleurer, peintres, dessinateurs, écrivains, musiciens, chanteurs, cinéastes, champion d’échecs – je pense à Spastky – amis de passage venus le saluer depuis son pays natal.

     Apatride, il acquit la nationalité française en 1999 ainsi que son épouse Tatiana rencontrée à Moscou après la chute du mur. Il retrouva en 2000 sa nationalité russe.

 

Revenant sur L’affaire Petit-Âne dans le numéro 1 de ses Cahiers (novembre 2009), le CRILJ a publié, grâce à Nicole Maymat qui lui en avait confié le texte, Le retour de Petit-Âne, suite « optimiste » du controversé Petit-Âne.

petit ane

 

 

Parce que les collections et les contraintes d’un éditeur parisien s’intéressant à ses textes ne lui conviennent pas, Nicole Maymat crée en 1973, à Moulins, avec Dominique Beaufils, imprimeur, les éditions Ipomée. Premiers titres : Le conte du pays des pas perdus illustré par Yolaine Deneux et Le Gang des chenilles rouges qui est publié avec des pages blanches à illustrer. Diffuseur défaillant, mais soutien des libraires et des critiques. Les rencontres s’enchainent avec des créateurs encore inconnus (comme Frédéric Clément, Claire Forgeot, Laurent Berman, Michel Boucher, Jacques Cassabois, Vitaly Statzynski, Martine Delerm, Anne Quesemand ou Laura Rosano) ou déjà confirmés (comme Alain Gauthier, Claude Lapointe, Nicole Claveloux ou Daniel Maja). Les collections ont pour nom Archipel, Herbes folles, Funambules, Jardins secrets. « Il y avait toujours un prix, des critiques positives qui nous encourageaient à continuer. C’était sans compter avec les impayés des uns, les dépôts de bilan des autres et, à un moment donné, le coût de la distribution, devenu extravagant. » Aujourd’hui directrice de collection au Seuil, Nicole Maymat est aussi auteur de plusieurs romans dont Vanille, flibustière des Antilles (2009) ou Le voyage de la Reine (2010).

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Anne-Marie Chapouton

 

 

 

     Parmi tous les écrivains qui, depuis les années 70, ont marqué la littérature de jeunesse dans notre pays, Anne-Marie Chapouton a occupé une place à part.

     Nous lui devons près de 200 ouvrages pour la jeunesse répartis entre de nombreux éditeurs. Bayard, Nathan, Hachette, Albin Michel, Casterman et, surtout, Flammarion Père Castor ont bénéficié de sa collaboration.

     De l’album pour tous petits aux livres de l’adolescence, l’univers qu’elle explore est celui du quotidien vu le plus souvent avec tendresse et humour. Beaucoup de ses ouvrages sont épuisés, en un temps où la durée des œuvres se heurte aux lois du marché. Nous lui devons aussi quelques belles traductions comme Akawak et On l’appelait Tempête.

     L’année du mistouflon a, dès 1975, inauguré une véritable symbiose entre la littérature de jeunesse et l’apprentissage de la lecture en classe. Son personnage a eu de nombreux émules, pas toujours aussi attachants et si bien mis en situation.

     Anne-Marie Chapouton a mené pendant les dernières années un combat courageux contre la maladie, sans cesser de travailler, épaulée en cela par Martine Lang à qui la liait une solide amitié. Un bon exemple de l’action éditeur-auteur dont il subsiste encore quelques témoins dans un monde où les rapports commerciaux tendant à devenir le modèle.

     On peut souhaiter que la disparition d’Anne-Marie Chapouton ramène, un temps au moins, l’attention sur cette œuvre de grande qualité humaine.

( article  paru dans le n° 67 – avril 2000 – du bulletin du CRILJ )

 mistouflon

Née en septembre 1939 à Millau, décédée à Lourmarin en janvier 2000, Anne-Marie  Chapouton a passé une partie de son enfance en Tunisie, en Hollande, puis aux Etats-Unis. Très jeune, elle est passionnée par la littérature et écrit en secret. Elle est diplômée de littérature française de l’Université de Columbia. De retour en France, à partir de 1964, elle s’installe dans le Lubéron et écrit des histoires pour sa fille. Elle se découvre alors une véritable vocation pour la littérature de jeunesse et partage son temps entre l’écriture et la traduction de romans anglo-saxons. Elle est auteur d’albums pour les petits, de contes, de nouvelles, de romans, de poèmes publiés chez de nombreux éditeurs parmi lesquels La vache Amélie (Père Castor, 1977), Clément et le rangement (Casterman, 1986), Berceuses pour une nuit de lune (Nord-Sud, 1991), Le loup Loulou (Bayard, 1999).

 

« Je  pense que ma terrible faim de lecture pendant mon enfance et le petit nombre de livres que je pouvais lire, après la guerre et vivant à l’étranger, ont accentué en moi l’importance des livres pour enfants. Je n’ai pas vraiment choisi d’écrire pour les enfants. Cela s’est fait par hasard. Je pensais que c’était un accident et que, plus tard, j’écrirai pour les adultes. »